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Le 8 octobre 2013 :
OVH Summit
Manifestation intéressante d’une entreprise respectable
Article mis en ligne le 9 octobre 2013
dernière modification le 15 janvier 2014

par Laurent Bloch

Vive OVH !

OVH est mon fournisseur depuis plusieurs années pour quelques sites hébergés, quelques noms de domaines et un petit serveur virtuel. Je n’ai qu’à me féliciter de leurs services (je n’en dirais pas autant de certains autres), ainsi lorsque le serveur de messagerie que j’avais imprudemment installé sur mon serveur a été victime d’un zero-day, leur système de surveillance l’a immédiatement détecté et a automatiquement désactivé les accès publics, tout en m’ouvrant un accès de service pour me permettre de réparer.

Fort de l’estime que m’inspirait cette société créée il y a une quinzaine d’années par une famille d’immigrés polonais sans un sou de capital, aujourd’hui un leader européen et même mondial, pas sur un petit marché de niche, mais dans le domaine de l’informatique en nuage (cloud computing), je décidai de m’inscrire à leur manifestation OVH Summit du 8 octobre 2013, et je m’y suis rendu (non sans quelques aventures sur le trajet, racontées ici).

OVH Summit réunissait quelques 1 500 personnes aux Docks de Paris, à la Plaine Saint-Denis (entre la Porte de la Chapelle et le Stade de France), endroit fort agréable, où l’on peut observer la naissance d’une nouvelle ville, avec de nouvelles activités industrielles, liées à l’informatique. Ainsi, des Data Centers y ont été construits pour tirer parti de l’excellente desserte du quartier par EDF, conçue à l’origine pour alimenter cette zone jadis dévolue à l’ancienne industrie, aujourd’hui disparue.

Facteurs du succès d’OVH

Octave Klaba, le DG, a présenté l’entreprise : onze Data Centers, dont un au Canada pour alimenter le marché d’Amérique du Nord tout en bénéficiant d’une législation sur la protection des données personnelles compatible avec les directives européennes. Pour le réseau, OVH ne fait pas appel à des FAI, mais loue de la fibre noire et construit son réseau privé redondant avec ses propres équipements, afin de maîtriser ses débits et ses temps d’accès, mais aussi pour pouvoir suivre les évolutions très rapides de la technologie de transmission par fibre optique. De même, ils assemblent leurs serveurs, n’externalisent pas leur centre d’appel et de support, et restent au contact de leurs clients. Bref, ils sont adeptes du « fait à la maison ». Normal, ils ne vivent que de leur clientèle, et comme ils ont oublié de recruter des inspecteurs des finances, ils ne bénéficient d’aucun marché protégé ni d’aucune subvention publique.

Henri Klaba, le père du précédent, PDG, ingénieur mécanicien de formation, s’occupe de tous les aspects physiques de l’infrastructure : 60 000 m2 de salles machines, des centres capables de loger chacun 400 000 serveurs physiques, des serveurs à refroidissement liquide conçus et fabriqués par eux (cela divise le volume par deux). OVH produit lui-même une partie de son énergie, avec des éoliennes de 1 MW conçues et fabriquées par eux. Au Canada, ils sont installés à Beauharnois, en amont de Montréal, près d’un barrage hydroélectrique sur le Saint-Laurent ; ce centre les met à 4ms de New-York, et ils ont aussi leur propre fibre transatlantique.

Pour résumer les secrets de leur succès : pas de compromission avec les autorités politiques, pas de marchés publics, ne pas suivre les conseils des experts en management. Le contraire d’Alcatel, quoi.

Les clés de l’échec d’Alcatel-Lucent

Aujourd’hui, après l’annonce de nouveaux résultats catastrophiques et d’un vaste plan de réduction d’activité (10 000 suppressions d’emplois, dont 900 en France), tout le monde pleurniche sur le triste sort d’Alcatel-Lucent (ce matin encore A. Montebourg sur France-Culture).

Il se trouve que depuis 25 ans j’ai souvent trouvé cette entreprise sur mon chemin, et que ce qui leur arrive n’est que la conséquence prévisible et méritée d’un management arrogant, incompétent et myope. Dommage pour les personnels qui n’auront pas trouvé de meilleur employeur.

Pendant de longues années Alcatel (et son conjoint Lucent, ex-AT&T) se sont engraissés sans fatigue sur le dos du monopole des télécoms. Il y a vingt-cinq ans j’avais parmi mes responsabilités celle des marchés de télécommunications du Cnam. Pour l’appel d’offres d’achat d’un autocommutateur pour un site déporté, j’ai reçu un revendeur Alcatel : son comportement était indescriptible, en-dessous de tout seuil d’éthique commerciale, avec des propositions que j’aurais cru réservées à certains potentats tropicaux.

Alcatel fut un des derniers équipementiers télécom à comprendre que l’avenir était à l’Internet, même pour la téléphonie. Et son PDG, Serge Tchuruk, ne rêvait que d’« industrie sans usines ». Pendant ce temps-là, Huaweï travaillait. Il est faux que les équipementiers chinois fassent du dumping : ils sont juste meilleurs. Et la politique protectionniste américaine pour les routeurs de cœur de réseau, que Montebourg admire tant, va juste plomber de 20 à 30% les comptes d’investissement des opérateurs américains.

Les recettes de l’échec d’Alcatel : inspecteurs des finances et X Télécom à tous les étages, soutien gouvernemental, marchés publics protégés. Bref, la grande industrie à la française, qui nous a conduits à 40 milliards d’euros de déficit annuel de la balance des paiements. Merci.

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