Les lecteurs de ce site connaissent mon intérêt pour les travaux de Michel Volle : son dernier livre, De l’informatique, paru chez Economica, est en librairie. L’auteur en donne une présentation sur son site, ainsi que le texte intégral.
Vous ne devriez pas hésiter à vous précipiter chez votre libraire pour vous procurer ce livre : en effet, il ne manque pas d’ouvrages techniques sur l’informatique, il ne manque pas non plus d’ouvrages sur le management de l’informatique écrits par des auteurs qui n’ont qu’une pratique dédaigneuse de cette discipline ; il y a déjà beaucoup moins d’ouvrages sérieux d’analyse économique de l’activité informatique ; mais il y a très très peu de livres qui, comme celui de Michel Volle, proposent au lecteur, à la fois, une analyse économique et des études de cas de management détaillées, étayées d’une part par une expérience pratique variée et de haut niveau, d’autre part par des analyses techniques précises. Le tout en moins de 600 pages, ce qui est finalement un exploit de concision.
Michel Volle ne recule pas devant les affirmations tranchées, dès les premières phrases du livre : « L’informatisation est le phénomène le plus important de notre époque. [...] [L'informatique] constitue une innovation intellectuelle dont l’ampleur, la profondeur et les implications se comparent à celles de l’invention de l’alphabet par les Phéniciens vers 1000 avant notre ère, puis des mathématiques et de la philosophie par les Grecs. » Une part de ses développements seront destinés à prouver et à illustrer ces assertions.
Or, face à une innovation si radicale, que voit le conseiller des entreprises (il fut celui d’Air France, de France Télécom, de l’ANPE) ? « Nos entreprises, nos institutions s’informatisent à l’aveuglette. Elles sont comme une personne qui avancerait à reculons, poussée par une main posée sur sa poitrine, et trébucherait sur le moindre obstacle. Lorsqu’on les examine, et une fois surmontée l’impressionnante technicité du vocabulaire et des méthodes, on découvre des absurdités qui surprennent ainsi que les résistances, plus surprenantes encore, qui s’opposent à ce qu’on les rectifie. [...] Lorsqu’on touche aux structures en place, aux intérêts des corporations, cela suscite certes des réactions violentes ; mais celles que l’on provoque lorsque l’on travaille sur les distinctions entre le réel et l’imaginaire, entre l’essentiel et le secondaire, sont plus violentes encore car elles touchent à l’échafaudage souvent bancal des valeurs sur lesquelles chacun appuie son propre discernement, ses propres priorités. Les obstacles de nature philosophique, métaphysique, sont plus difficiles à surmonter que les obstacles institutionnels : nous en fournirons plusieurs exemples au cours de cet ouvrage. » Et un autre versant du livre illustrera les errements de la conception des systèmes d’information, où Michel Volle distingue la tâche principale pour le travail des hommes pendant le siècle qui s’ouvre. Est-il possible de se dérober à l’urgence de cette injonction ? Non, bien sûr.