Diplomate, Bernard Bajolet a été en poste à l’ambassade de France à Alger (1975-1978) et à Damas (1986-1990), puis ambassadeur successivement à Amman (1994-1998), Sarajevo (1999-2003), Bagdad (2004-2006), Alger (2006-2008) et Kaboul (2011-2013). Après ce dernier poste il sera coordinateur national du renseignement, et enfin directeur de la DGSE (Sécurité extérieure).
Autant dire qu’il a vu du pays, et pas spécialement dans des ambiances paisibles. À plusieurs reprises il a dû intervenir dans des affaires de prise d’otages (et a pu contribuer à leur libération), il a lui-même (avec des membres de ses équipes) échappé de peu à plusieurs attentats.
Dans chacun de ses postes, Bernard Bajolet s’est attaché à apprendre la langue du pays et à en étudier la culture, ce qui lui a permis une meilleure compréhension des sociétés et de la politique locales, dont le moins que l’on puisse dire est qu’elles sont particulièrement complexes, que l’on songe à la diversité culturelle, religieuse et ethnique de pays comme la Bosnie-Herzégovine, l’Irak, la Syrie ou l’Afghanistan. Dans son livre il réussit à en donner des descriptions raisonnablement complètes et néanmoins concises et compréhensibles (enfin, autant que faire se peut).
Une attention particulière est accordée au conflit israélo-palestinien, qui conditionne toute la politique du Moyen-Orient, aux espoirs suscités par les avancées diplomatiques de la fin du XXe siècle, et à la façon dont ils sont aujourd’hui ensevelis. Les événements tragiques de Syrie sont aussi analysés par l’auteur, qui connaît particulièrement bien ce sujet.
Si le poste le plus dangereux semble avoir été Bagdad, où il observait, seulement dans la ville, 60 tirs de roquettes par jour et de 3 à 4 000 morts par mois dans des attentats, Kaboul et la province de la Kapisa, où opérait le contingent français, étaient aussi très exposés. La corruption était absolument généralisée dans ces deux pays, mais de ce point de vue le record semble détenu par la Bosnie-Herzégovine, où chaque groupe national (si on peut les qualifier ainsi) semble représenté principalement par un ou plusieurs groupes maffieux.
Le livre comporte six cartes (ex-Yougoslavie, péninsule arabique, Moyen Orient actuel et à l’époque des mandats français et britannique, Irak, Afghanistan) qui sont bien utiles à la compréhension des situations évoquées.
Bref, la lecture de ce livre, au demeurant d’une plume alerte et agréable, sera utile à quiconque veut comprendre le monde contemporain, dont le sort se joue pour une bonne part dans les régions qu’il évoque.